DRH, les mal-aimés ?
Vous connaissez la série The Office ? C’est un des plus gros succès TV de ces 20 dernières années. Il s’agit d’une comédie se présentant sous la forme d’un faux documentaire qui relate le quotidien d’une entreprise de vente de papier en Pennsylvanie, aux Etats-Unis. Cette série nous plonge dans la vie des employés d’une petite succursale, et, principalement, dans la vie du Directeur général, Michaël Scott, parfaite synthèse de tout ce qu’il ne faut pas faire en termes de gestion des ressources humaines. Pourquoi ?
Attitudes caricaturales, remarques sexistes, commentaires racistes, décisions arbitraires, gamineries, injustice envers de nombreux employés… la gestion des RH dans The office est une catastrophe. A l’écran, cette série récompensée par de nombreux prix dont des Emmy Awards et un Golden Globe pour Steve Carell (Michael Scott), est très drôle. Dans la vie, un tel manager serait tout simplement impossible à vivre. La caricature du DRH y est, en effet, totale ! Mais tout stéréotype cache souvent un fond de vérité… Questionner les DRH est légitime. D’autant que la crise sanitaire a démontré que plus que jamais, ils sont au cœur de l’entreprise et qu’ils doivent sans cesse repenser leur travail et celui des autres.
Il est évidemment important de souligner qu’il n’existe pas un métier RH. En fonction des entreprises, le quotidien peut être très différent. Il y a bien sûr des RH/comptable/office admin dans des mini-structures, il y a aussi des métiers RH dans des grosses équipes. Certains métiers sont plus analytiques et d’autres davantage centrés sur la personne (recrutement, onboarding…). Mais voyons si vous vous retrouverez dans certains passages 😊.
Premier a priori : une langue à part
Une des critiques que l’on fait parfois aux ressources humaines, c’est de parler une langue inconnue et secrète. Il faut reconnaître qu’entre les ROI, les SIRH, les KPI, les jobboards, les onboardings, les Assessment Centers, les ATS, les DPAE… il y a de quoi se perdre quand on n’est pas initié. Oui, les professionnels des RH ont leur propre langue. Comme beaucoup de métiers d’ailleurs. Les comptables, les journalistes, les juristes… ont aussi leur jargon.
En revanche, il est capital pour un RH de rester connecté et compréhensible pour l’ensemble des collaborateurs. Ce n’est pas toujours le cas, et le recours massif à des anglicismes et abréviations peut être problématique puisqu’ils se font au détriment de mots en néerlandais ou en français, beaucoup plus accessibles.
Deuxième a priori : un métier féminin
Pour beaucoup, les métiers RH sont des métiers de femmes… et à raison si l’on regarde les chiffres : aux Etats-Unis, les femmes représentent 80% des métiers RH. En France, les chiffres avancés évoquent 70%. Pour la Belgique, Statbel (l'office belge de statistique) ne communique pas de chiffre précis, mais confirme que le secteur est majoritairement féminin. Est-ce l’aspect médiation qui séduit majoritairement les étudiantes ? Ou bien le côté humain inhérent à la fonction ? Il serait intéressant de réaliser un sondage à ce sujet…
En revanche, si les femmes représentent une majorité dans les métiers RH, le pouvoir, lui, est masculin. Aux Etats-Unis et en France, les directions RH sont très majoritairement occupées par des hommes. Les chiffres pour la Belgique ne sont pas disponibles mais on peut supposer que chez nous aussi, le pouvoir est une question d’hommes. Et malheureusement, l’injustice salariale règne dans le monde RH. Une femme gagne en moyenne 6% de moins qu’un homme à travail égal (chiffres Statbel).
Troisième a priori : dans le monde joyeux des Bisounours
Le professionnel RH est parfois perçu par les autres collaborateurs comme un peu trop bisounours, gentil et vivant sur une autre planète faite de « Tout va bien », « Ca va aller, c’est super », « Allez les gars, tout donner hein »…
C’est parfois un peu agaçant cet optimisme à toute heure mais, soyons de bon compte, ça fait aussi du bien dans une société où beaucoup passent leur temps à râler.
On peut parfois être également agacé d’entendre les RH répéter que « la porte est toujours ouverte », qu’il est important « de pouvoir parler des situations problématiques en toute confiance », etc. mais lorsqu’il y a un problème, on est bien content d’avoir quelqu’un à qui s’adresser.
Quatrième a priori : tests, tests, tests !
Enfin, un autre reproche formulé est d’avoir des RH prisonniers de certains outils ou méthodes. On a tous en tête le prénom d’un collègue RH qui ne jure que par les tests de personnalité (couleurs, ennéagramme…) et qui désigne tel collaborateur « typique des 7 », « tellement jaune » ou qui se dit qu’il serait temps de faire un petit « PAPI » (Personality and Preference Inventory) pour tel autre collaborateur. On pense aussi à cet autre RH qui demande de toujours utiliser tel outil informatique et qui oublie que la réalité du travail est complexe et ne permet pas toujours l’application dudit outil.
Mais, soyons de bon compte encore. La réalité du RH est qu’il est devenu un véritable couteau suisse qu’on ouvre à pas d’heure et à qui on demande d’avoir des compétences 360°.
La réalité : un métier en pleine mutation
Le métier de RH est en pleine mutation. On pourrait d’ailleurs l’écrire au pluriel : pleines mutations. Il y a d’abord la mutation des territoires. Etre DRH aujourd’hui, ce n’est plus uniquement travailler sur les recrutements, les départs et le bien-être des employés. Ce n’est plus être un maillon de l’administratif. On notera d’ailleurs que les fonctions purement administratives ont tendance à être externalisées. Le territoire RH est aujourd’hui teinté de marketing, de connaissances juridiques ou économiques, de stratégie d’entreprise… On attend d’ailleurs parfois du DRH d’être un magicien, capable avec son équipe d’insuffler la culture d’entreprise aux collaborateurs sans dépasser les budgets.
Ensuite, la robotique et l’intelligence artificielle transforment et continueront à transformer les métiers actuels. C’est la mutation technologique. Comme l’a montré une récente étude de Dell : 85 % des emplois de 2030 n'existent pas encore. Ces nouveaux métiers, il va falloir les intégrer et les développer dans les entreprises. Ce sera, entre autres, du ressort des RH.
Enfin, il y a également la mutation des profils. Nous l’avons déjà écrit lors d’une précédente newsletter (n°79), les sociétés doivent aujourd’hui jongler avec 4 ou 5 générations de collaborateurs. Le choc générationnel est réel et les profils sont très différents dans leurs savoirs, leurs attentes et la manière dont ils envisagent leur rapport au travail. Là aussi, c’est le DRH qui est au centre du jeu pour s’assurer que toutes ces personnes collaborent et travaillent ensemble. Il doit faire de cette diversité un tremplin et non un plafond et un frein pour l’entreprise.
Cinq raisons d’aimer les DRH (et on s’est limité !)
- Tout d’abord, ils sont les premiers à insuffler une culture d’entreprise authentique. Les DRH savent que les employés constituent la ressource première d’une société et qu’il est essentiel d’investir en eux. De les embarquer dès leur premier jour dans l’
- Deuxièmement, ceux qui travaillent dans les RH ont un œil ou un instinct que peu ont. Ils savent en effet reconnaître un talent et ils savent aussi le placer à sa juste position dans l’entreprise, car ils en connaissent les objectifs.
- Troisièmement, les DRH croient en chacun d’entre nous. Ils ont développé des programmes d’apprentissage, des programmes d’accueil (pour ne pas utiliser « onboarding »), ils militent pour investir dans la formation et l’évolution personnelle, ils prônent la montée en compétence et le bien-être.
- Quatrièmement, les DRH sont un tampon efficace entre la direction et le personnel. Il est d’ailleurs amusant de constater que la direction leur reprochera parfois d’être du côté du personnel alors que le personnel reprochera, au contraire, aux RH, d’être trop proches de la direction. Un double constat qui permet de conclure qu’ils sont donc en fait dans le juste milieu.
- Enfin, n’oublions jamais que les fêtes et les team-buildings passent par eux. Et que c’est dans ces moments-là qu’on se fait avoir les meilleurs souvenirs au travail.