6 conseils pour communiquer une mauvaise nouvelle
« You are fired » (« tu es viré »). C’est la phrase qui a rendu Donald Trump célèbre aux Etats-Unis dans la télé-réalité « The Apprentice » dans les années 2000. Tellement célèbre qu’il deviendra le 45e président américain. Si à la télévision, ne faire preuve d’aucune diplomatie ou d’aucune empathie est plutôt un gage de clashs, de rancœurs et donc d’audiences, dans la vraie vie, c’est différent. Voici toute une série de conseils pratiques pour communiquer les mauvaises nouvelles.
En entreprise, nous pouvons être amenés à annoncer une multitude de mauvaises nouvelles. Par exemple, refuser d’accorder une promotion, une formation ou une augmentation ; demander de changer de postes, de lieu de travail ou d’horaires ; licencier un collaborateur ou mettre fin à une consultance ; augmenter les heures de travail sans compensation salariale ; négocier un salaire à la baisse ; partager une mauvaise évaluation, réduire les effectifs d’une équipe ou les moyens financiers ; communiquer une sanction…
Personne n’aime communiquer des mauvaises nouvelles, mais il faut le faire. Et en tant que manager ou RH, cela fait partie intégrante de votre rôle et du processus de décision.
Voici nos 6 conseils pour vous préparer de manière optimale.
1. On ne tourne pas autour du pot
On connaît tous la métaphore du sparadrap : vaut-il mieux arracher le sparadrap d’un coup ou le décoller en douceur durant de nombreuses minutes ? Parfois, les choses doivent se faire vite.
Quand vous devez annoncer une mauvaise nouvelle, ne tournez pas autour du pot. Ne commencez pas par des « small-talk » sur la famille, les collègues, les amis : « Comment vas-tu ? Et tes enfants ? » … Abordez immédiatement les nouvelles désagréables, c’est une preuve de respect envers votre interlocuteur. Vous éviterez ainsi de susciter inutilement l’angoisse ou l’émoi de vos collaborateurs. Prenons pour exemple la police qui vient sonner à votre porte : vous comprenez tout de suite que quelque chose ne va pas, et vous attendez de leur part une approche directe.
2. Des mots bien choisis
Les mots et le langage choisis sont essentiels. Le langage doit être facile à comprendre et doit expliquer l'information ou la décision avec clarté. N’utilisez pas de jargon, n’essayez pas d’adoucir la décision pour qu’elle paraisse moins sévère. On n’emballe pas une décision négative. On la communique. Soyez donc franc et direct. Donnez un maximum de détails objectifs et factuels sur la décision, sa raison d’être et ses motivations. Une décision bien comprise sera toujours mieux acceptée.
Parfois, certains managers veulent rallier leurs collaborateurs aux décisions prises. C’est une erreur, car l’idée n’est pas d’obtenir leur aval, mais bien de leur faire comprendre le bien-fondé de la décision.
- Est-ce que mon collaborateur doit être d’accord avec la décision ? Non.
- Doit-il en tirer de la motivation ? Non.
- Doit-il la comprendre ? Oui.
Une décision bien fondée ne sera pas nécessairement validée, mais elle sera mieux accueillie.
3. Solidaire des émotions et de la décision
Quand vous annoncez une mauvaise nouvelle, pensez à rester loyal à la décision prise et au ressenti de vos collaborateurs. Pour le premier niveau, que cette décision soit de votre fait ou non, une fois qu’elle a été prise, il ne vous appartient pas de la critiquer. Vous pouvez vous battre bec et ongles avec votre management lors du processus de décision, mais ensuite, acceptez qu’elle ait été actée.
- Si vous en êtes solidaire, utilisez le « nous avons décidé ».
- Si pas, employez plutôt le « il a été décidé ».
Enfin, si tout le monde sait que c’est une décision qui va faire mal mais qu’on ne peut rien y faire, n’essayez pas de la faire passer pour positive, vous en perdriez votre crédibilité. « Le siège a décidé que XXX, je sais que c’est last minute mais nous n’avons pas le choix, nous devons le faire. » passera mieux que « vous allez voir, c’est génial en fait », alors que ça ne l’est pas.
Une décision prise doit être mise en place le plus rapidement possible. Le moment du partage de la décision n’est plus un moment de discussion ou de négociation.
Pour le deuxième niveau, vous devez aussi être solidaire des émotions de vos collaborateurs. Diplomatie et empathie sont nécessaires. « Je comprends que cette décision est difficile à entendre… » ; « Je réalise que vous ne vous attendiez pas à cette décision … » ; être franc et direct n’implique pas d’être froid et distant.
Cette solidarité des émotions se fera également dans l’accompagnement prévu. Vous expliquerez donc la suite qui sera faite à la mauvaise nouvelle, l’impact concret sur le travail du collaborateur, le timing de la décision, le processus qui sera mis en place. En revanche, si vous sentez que votre collaborateur est bouleversé et dans l’émotivité, n’hésitez pas à lui laisser du temps et lui proposer d’en reparler le lendemain. Ainsi, il aura eu un peu de temps pour digérer la nouvelle.
4. Ne pas négliger la préparation
Une entrevue pour annoncer une mauvaise nouvelle ne doit absolument pas être prise à la légère. « Un jour, tout jeune manager dans une radio nationale, on me signale qu’une animatrice est arrivée pour son entretien avec le directeur général et qu’elle s’impatiente, car il a déjà 20 minutes de retard. Je lui téléphone pour lui rappeler son rendez-vous. Il dit qu’il a oublié et me demande de me charger de l’entretien qui devait mettre fin à la collaboration avec cette animatrice sans me préciser ses motivations et l’accompagnement à mettre en place. Il m’avait juste demandé de lui dire qu’elle ne convenait plus. J’ai trouvé cette manière de faire totalement irrespectueuse pour tout le monde et ça a donné une image catastrophique du directeur général en interne », témoigne Nicolas, ancien journaliste radio.
De fait, pour annoncer une mauvaise nouvelle, on se prépare. On n’hésitera d’ailleurs pas à répéter la scène pour préciser ses arguments et être sûr de venir avec les éléments les plus factuels possibles.
5. Ouvrir la porte
Annoncer une mauvaise nouvelle est une étape déplaisante du travail de manager ou RH. Mais, si la décision n’est pas définitive (comme le serait un licenciement, par exemple), il peut aussi être possible de communiquer une mauvaise nouvelle et d’ouvrir une porte en guise de conclusion. Pour un refus d’augmentation, un changement de poste, une demande d’avantage extra-légal… n’hésitez pas à donner une nouvelle échéance où la discussion pourra être reprise. « Nous ferons le point dans 3-6 mois et nous verrons si la situation permet à ce moment-là de revoir notre décision » … Vous l’avez compris, il est important d’offrir des perspectives positives, mais, évidemment, ne faites jamais de fausses promesses. Si la décision ne peut pas être revue dans les prochains mois, la transparence s’impose et il faut pouvoir le partager également.
6. Encadrer le manager
Celui qui annonce la nouvelle, le manager/RH, doit aussi être accompagné dans son rôle. Il représente la direction de la société et il faut donc s’assurer qu’il soit capable de gérer cette situation de manière objective, correcte et loyale. Il en va de sa crédibilité à lui et bien sûr, de celle de toute l’entreprise.
Une société qui démontre sa capacité à gérer efficacement et humainement des moments compliqués, aura un engagement plus important de la part de ses collaborateurs par la suite.
Une approche individuelle… et collective
Enfin, une mauvaise nouvelle individuelle ou collective ne s’annonce pas de la même façon. On ne parle pas à 10-20-100 personnes comme on parle à une. Et surtout, on ne peut pas prendre des décisions pour un groupe sans l’encadrer. Il existe en effet des modus operandi qui sont parfois clairement définis par la convention collective de travail ou par les engagements pris avec les syndicats. Et parfois, la loi s’en mêle. En Belgique, en cas de licenciement collectif, la procédure Renault s’impose. Mise en place en 1998 suite à la fermeture brutale de l'usine Renault à Vilvorde qui avait laissé sur le carreau 3.000 travailleurs du jour au lendemain, elle oblige l’employeur qui souhaite procéder à un licenciement collectif, à respecter des procédures bien définies. Exemples : informer au préalable les représentants des travailleurs ; demander l'avis des représentants des travailleurs à ce sujet ; faire part du projet de licenciement collectif au directeur régional de l’emploi, etc. Par ailleurs, l’employeur est également tenu de payer une indemnité spéciale en cas de licenciement collectif de travailleurs.