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Comment gérer les problèmes personnels de nos collaborateurs ?

Qu’est-ce que ça pourrait être agréable de disposer d’une télécommande qui nous permette de zapper nos problèmes. Il suffirait d’un petit bouton et on passe à autre chose. Et hop. Next.

Mais, on le sait tous, ça n’existe pas. Ni pour nous, ni pour les autres. Nous sommes donc contraints de nous confronter à nos problèmes. Et d’apprendre à les gérer ou à vivre avec.

Parfois, nous les ramenons également sur notre lieu de travail. Ils franchissent avec nous la porte d’entrée le matin et peuvent nous hanter toute la journée.

Pour les managers et les RH, la limite est parfois ténue entre le respect nécessaire de la vie privée, et l’envie d’accompagner un collaborateur qui souffre, situation qui peut d’ailleurs avoir un impact direct sur le travail ou l’équipe.

Que faire ? Que dire ?

Cette nouvelle OpenSpace va essayer d’apporter quelques éléments de réponse.

 

Bonne lecture,

 

Claudia

Article thématique

  • Ecouter sans juger et agir conjointement

    Certains collaborateurs emmènent avec eux leurs problèmes personnels au bureau. L’impact peut être réel pour l’entreprise. Il est essentiel d’aborder le problème sans détours. Mais, en n’oubliant jamais que le manager n’est ni un copain, ni un psy.

    Il est important d’apprendre à détecter les collaborateurs en souffrance, car l’impact peut être réel sur l’entreprise. Il est essentiel aussi d’aborder le problème sans détours. Mais, en n’oubliant jamais que le manager n’est ni un copain, ni un psy.

     

    Les raisons qui peuvent pousser un collaborateur à amener au bureau un petit sac à dos virtuel avec ses problèmes personnels sont nombreuses. Il y a, bien sûr, le stress de la vie quotidienne avec sa charge mentale (courses, enfants, obligations familiales…). Il y a aussi les vies amoureuses qui, parfois, s’entrechoquent. Pas facile d’être concentré quand la personne qu’on aime est dans les reproches personnels ou après une rupture. Il y a encore le pouvoir d’achat en berne dans notre pays qui amène certains Belges qui travaillent au bord de la pauvreté. Il y a aussi les informations anxiogènes qui se succèdent sur nos écrans.

    Nous aimerions tous pouvoir déposer, en entrant sur notre lieu de travail, ces petits (ou parfois gros) sacs à dos virtuels. Mais ce n’est pas possible. Nous devons faire « avec ». Tout comme l’entreprise pour qui, c’est un enjeu majeur.

    Apprendre à détecter les collaborateurs en souffrance

    « Un de mes collaborateurs a perdu une bonne quinzaine de kilos en un mois début d’année. J’ai d’abord pensé qu’il avait dû se mettre au sport intensivement. Mais, en parlant avec ses collègues, j’ai appris qu’il venait d’être quitté par sa compagne pour un de leurs amis. Un cliché aussi vieux qu’insupportable. Il était en grande souffrance. En discutant avec lui, il m’a d’ailleurs avoué être incapable de manger normalement depuis des semaines. J’étais passé totalement à côté de ce qu’il vivait » confie Céline, manager dans une agence digitale.

    Quand on est manager ou RH, le quotidien parfois très chargé ne permet pas toujours de « voir » que certains de nos collaborateurs passent une période plus compliquée. C’est d’autant plus vrai que les difficultés ne s’expriment pas de la même manière chez tout le monde.

    Et pourtant, certains symptômes peuvent nous alarmer. 

    Un des tous premiers est le changement physique. Une perte ou un gain excessif de poids, par exemple. Une négligence vestimentaire ou corporelle qui peut laisser penser que le collaborateur se laisse un peu aller.

    Autre alerte ? Des erreurs qui se font dans le travail et qui ne se faisaient pas auparavant : des oublis d’agenda, des mails envoyés négligemment, des rapports incomplets…

    Troisième alerte : les absences. Régulières et répétées, elles traduisent un mal-être profond (nous vous renvoyons vers notre précédente newsletter consacrée à l'absentéisme).

    Enfin, ce qui peut alerter également, c’est un changement de comportement. S’isoler le midi, devenir extraverti alors que l’on ne l’était pas, arriver trop tôt au travail (ou être systématiquement en retard), faire des heures supplémentaires excessives et injustifiées.

     

    Comment aborder le problème ?

    La frontière entre la nécessité de savoir ce qui se passe et l’intrusion dans une vie privée est parfois ténue. Il n’est pas facile non plus de trouver les bons mots ou le bon moment.

    Voici quelques éléments à prendre en compte :

    • A l’instar de Céline, la première approche peut être d’échanger avec les collègues proches du collaborateur.
    • Bien rappeler à tout le monde que l’enjeu n’est pas pour vous de savoir ce qui se joue à l’extérieur, mais bien de s’assurer du bien-être de votre collaborateur ;
    • Proposer (sans imposer) une entrevue individuelle au collaborateur afin qu’il puisse, s’il le souhaite, exprimer ce qu’il ressent.
    • L’idée n’est pas seulement d’entendre son collaborateur, mais bien de l’écouter afin qu’il sache que l’entreprise avec laquelle il collabore le prend en compte.

     

    Empathie sans juger

    Lors de l’entretien, la conversation ne doit jamais être intrusive. Il est, par exemple, plus simple pour quelqu’un d’entendre :

    • « Quelque chose ne va-t-il pas » plutôt que « Je vois que ça ne va pas »
    • « Souhaites-tu en parler » plutôt que « Il faut qu’on parle » … Le consentement à exposer sa vie privée est essentiel.

    Le maître-mot est donc l’empathie. C’est-à-dire, non seulement la capacité de se mettre à la place de l’autre, mais également de l’aider. Le tout, sans aucun jugement.

    Il est également essentiel de se rappeler que le RH ou la manager n’est pas un ami ou un psy. L’empathie et l’écoute se font dans le strict cadre du travail, afin que celui-ci ne soit pas impacté. Il est donc important de rappeler au collaborateur que la discussion se fait pour trouver des solutions dans l’entreprise, mais que pour ce qui est d’ordre extra-professionnel, vous n’êtes pas le bon interlocuteur. Mettre une limite permet également de bien faire comprendre à certains collaborateurs qui seraient tentés de voir soudainement en vous un proche duquel se rapprocher, que vous ne l’êtes pas.

    On rappellera, enfin, que l’empathie, ce n’est pas accaparer les problèmes de l’autre. Un manager ne doit pas se projeter à la place de son collaborateur et décider pour lui en amenant des solutions clef en main.

     

    Une aide pratique

     

    Une bonne question à poser à un collaborateur en difficulté est : « En quoi puis-je t’être utile ? ».

    Il pourra alors peut-être exprimer ce qu’il attend de l’entreprise et amener des propositions qui lui permettront de mieux vivre au travail sa situation personnelle.

     

    En tant que manager ou responsable RH, vous avez la possibilité de mettre en place certaines mesures :

    • Un aménagement d’horaire ;
    • Une réduction de temps de travail ;
    • Une réduction de certaines charges de travail ;
    • Un renforcement du travail online ou, au contraire, en présentiel
    • Un renvoi vers les ressources internes (médecin du travail, psychologue…)
    • Un renvoi vers des ressources externes comme un professionnel de l’écoute.
    • Dans des cas plus graves, aider le collaborateur passera par l’encourager à entamer une démarche vers un service adéquat (assistanat social, police…)

    Toutes ces mesures doivent être prises dans un état d’exception et de transition. Elles sont mises en place le temps que le collaborateur aille mieux et puisse, de son côté, solutionner ce qui doit l’être. Ce contrat doit être clair entre l’entreprise et le collaborateur.

     

    Montrer à la personne en détresse qu’elle n’est pas seule permet aussi de démontrer à l’ensemble des collaborateurs que l’entreprise n’est pas qu’un lieu de performance et de chiffres. C’est aussi l’occasion pour les managers et les ressources humaines de travailler sur un autre aspect essentiel du management : la prévention. On le sait, les risques d’absences ne sont pas uniquement liés à des problèmes de santé. Accompagner des collaborateurs en souffrance personnelle est aussi une bonne manière de prévenir de plus longues absences.

Inspirations

  • Les boss aussi ont des problèmes…

    Il n’y a évidemment pas que les collaborateurs qui rencontrent des problèmes familiaux. Il y a quelques années, une étude a fait grand bruit aux Etats-Unis.

    Intitulée "My Family Made Me Do It", cette étude révèle que les problèmes familiaux pèsent souvent sur les superviseurs mentalement et émotionnellement, un phénomène connu sous le nom d'épuisement de l'ego, et qu'ils reportent leurs frustrations sur les employés. Amy Colbert, co-auteur et professeur de gestion et d'organisations au UI Tippie College of Business, affirme que les recherches antérieures ne prenaient en compte que les facteurs liés au travail pour influencer la supervision abusive. C’est la première fois que le lien problèmes familiaux, problèmes de manager était amené et étudié directement. L'étude a remporté le prix Rosabeth Moss Kanter 2017 du Boston College Center for Work and Family, qui récompense une recherche exceptionnelle sur le travail et la famille.

    Source : https://now.uiowa.edu/2017/11/when-boss-brings-family-problems-office

     

  • Le conseil de la pro : des contacts réguliers

    Interrogée sur le sujet par la Harvard Business Review, Linda Hill, professeure à la Harvard Business School et auteure de Being the Boss donne un autre conseil précieux : « Vérifiez régulièrement que votre collaborateur va bien ».

    Elle suggère de régulièrement (mais raisonnablement) demander au collaborateur en souffrance s’il va bien, s’il va mieux. Cela peut se faire en passant dans son bureau ou par e-mail. Elle suggère également de ne jamais forcer la discussion, juste de tendre la main pour faire savoir que le lien créé est sincère et maintenu. Elle propose également de toujours laisser une porte ouverte « n’hésitez pas à venir si besoin ».

    Source : https://hbr.org/2018/07/how-to-manage-an-employee-whos-having-a-personal-crisis

Le saviez-vous ?