« Un pour tous, tous pour un »
Le principe d’inclusion en entreprise dépasse de loin le handicap. Il ambitionne que chacun trouve sa place. Penser l’inclusion en entreprise, c’est s’engager à voir le monde différemment. Il ne suffit en effet pas d’additionner des différences (de handicaps, d’origines, de croyances ou de genres) pour faire du groupe une unité. Il faut aussi vouloir installer durablement une interaction entre ces différences. Et il faut que tous puissent participer.
Chaque année dans le monde, environ 100.000.000.000.000 de m3 de neige tombent à la surface de la Terre. Chaque m3 contient environ quelques milliards de flocons de neige. Cela fait donc des millions de milliards de flocons qui, chaque année, viennent blanchir notre planète. Et pourtant, il n’y a pas deux flocons identiques. C’est la même chose pour les hommes. Certains se ressemblent physiquement. Mais vous ne trouverez jamais deux personnes rigoureusement identiques physiquement ou mentalement. Et si on alignait les 80 milliards d’humains nés depuis les origines de l’Homme, il n’y en aurait pas deux identiques. Il en va de même pour les plantes, les arbres, etc. La diversité et la différence sont l’essence de la vie. Et elles s’invitent de plus en plus en entreprise.
Une manière d’envisager son rapport au monde
Quand on parle d’entreprise inclusive, on évoque généralement l’inclusion des personnes en situation de handicap. Mais le principe d’inclusion en entreprise dépasse de loin le handicap. Il s’agit que chacun trouve sa place. Il suffit de regarder les publicités, d’écouter les débats citoyens et politiques pour se rendre compte que la diversité et l’inclusion sont à la mode. L‘équipe de football nationale belge n’est-elle pas elle-même devenue le symbole de ce monde fait de diversité ?
L’inclusion dépasse le constat de nos différences pour nous inviter à interagir ensemble pour le bien d’un projet commun, quel qu’il soit : économique, social, sportif… L’inclusion est une question d’impact. Comme le dit très justement Vernā Myers (inclusion strategist, cultural innovator, and social commentator américaine) : « La diversité, c’est être invité à la fête. L’inclusion c’est être invité à danser. »
Les implications et bonnes pratiques
Etre une entreprise inclusive, c’est un réel engagement vis-à-vis de l’individu avec une visée collective et structurelle. C’est la volonté de sortir du « politiquement correct de façade ».
La première implication d’une entreprise inclusive, c’est sa capacité à mettre en place des politiques non discriminatoires et à le faire savoir. C’est ce qu’on appelle l’engagement. La seconde implication, c’est la lutte contre les discriminations et la volonté de sanctionner ceux qui la pratique. Comportements racistes, sexistes, homophobes…
La troisième implication, c’est de prendre des décisions qui permettent à chacun d’avoir une place. Il est par exemple décidé d’avoir un quota de X% de femmes ou de personnes d’origines étrangères ou de personnes en situation de handicap dans la société à certains niveaux de pouvoir. Mais plus loin que ça, les décisions doivent permettre une réelle égalité de traitement. Pour le dire plus clairement, il ne suffit pas d’avoir des femmes dans un conseil de direction pour être inclusif, il faut qu’elles puissent s’exprimer et être écoutées au même titre que les hommes. Il ne suffit pas d’avoir des personnes en situation de handicap, elles doivent posséder les mêmes droits et les mêmes chances que tout un chacun.
Quatrième implication, tous les territoires doivent être accessibles à tous. En pratique, essayez de mettre en place une stratégie d’acquisition de talents reposant sur l’égalité des chances et la valorisation du mérite comme fondements et prenant en compte le parcours particulier (religion, handicap, genre, préférence de genre…) de chacun.
Mais toutes ces implications ne servent à rien s’il n’y a pas d’action sur la structure de l’entreprise en tant que telle. C’est la cinquième implication. Faites preuve par exemple d’une certaine flexibilité pour permettre à chacun d’avoir un rythme qui correspond à sa réalité : une maman qui allaite, une personne handicapée qui doit avoir des heures de soin, une personne pratiquante qui souhaite un congé tel jour plutôt que tel autre. Des aménagements pour une accessibilité aux personnes à mobilité réduite…
Inclusion et performance
Vous souhaitez vous engager sur la voie de l’inclusion ? Vous avez bien raison, et votre entreprise a tout à y gagner. Car une entreprise qui permet à chacun d’être celui qu’il est et de l’exprimer voit ses salariés se sentir bien dans leur société. De plus, favoriser la rencontre de différents talents constitue une source de richesse et crée même de la valeur.
3 études démontrent les avantages tangibles de la diversité sur le lieu de travail :
- Selon PWC, la diversité au travail permet de réduire la rotation du personnel au sein de la société, de réduire les conflits et d’augmenter la collaboration et l’engagement des collaborateurs.
- Selon le cabinet de conseil Deloitte : « Les entreprises qui pratiquent une politique inclusive génèrent jusqu’à 30 % de chiffre d’affaires supplémentaire par salarié et une profitabilité supérieure à celle de leurs concurrents. »
- Enfin, le BIT (Bureau International du travail) explique que les entreprises inclusives ont « 60 % de chances supplémentaires de voir leurs profits et leur productivité augmenter, d’avoir une meilleure réputation, de mieux attirer et conserver les talents ou encore d’engendrer plus de créativité et d’»
Etre inclusive est donc un investissement bénéfique pour l’entreprise, tant au niveau humain que performance.
Les bons élèves
Il y a presque 40 ans, Soichiro Honda, le fondateur de l’entreprise japonaise Honda, a donné sa vision de l’entreprise en ces termes : « Si vous n'embauchez que des personnes que vous comprenez, l'entreprise ne pourra jamais obtenir des personnes meilleures que vous ne l'êtes. N'oubliez jamais que vous trouvez souvent des personnes exceptionnelles parmi celles que vous n'aimez pas et qui ne vous ressemblent pas particulièrement. » Cette position entérine l’enjeu de la diversité et de l’inclusion dans les entreprises. Et elles sont de plus en plus nombreuses à passer le cap de l’inclusion.
Le Financial Times a publié en novembre 2019 une enquête sur les « leaders de la diversité ». Elle a analysé et classé 700 entreprises dans 10 pays européens en fonction de la diversité et de l’inclusion sur le lieu de travail. Le podium est le suivant : booking.com (NL), Colgate-Palmolive (Suisse), Willmott Dixon (UK). La première entreprise belge est Solvay à la 9e place. Ce classement est une belle carte de visite pour les entreprises qui s’y hissent.
Limites et problèmes ?
Vouloir une égalité des chances, combattre les comportements inappropriés (sexiste, validiste, raciste, homophobe…) est un combat de première nécessité qu’il faut mener sans relâche.
Mais, car il y a un mais, il faut faire attention à ce que cette nouvelle pratique ou politique d’entreprise n’abîme pas ce qui fonctionne déjà dans la société. Ne créez pas de tensions là où il n’y en avait pas. L’inclusion doit être vécue comme « un plus » par les collaborateurs.
On évitera donc, premièrement, une « hiérarchie des inclus ». Il faut éviter que les personnes en demande d’inclusion aient l’impression qu’on en fait davantage pour tel groupe plutôt que tel autre. Plus pour les croyants, par exemple, que pour les handicapés. Ou plus pour les femmes que pour les LGBTQ+. Il n’y a pas de concurrence des inclusions. L’approche doit donc être globale.
Deuxièmement, il est essentiel de présenter l’inclusion comme une pratique positive pour tous et ainsi éviter un esprit de revanche des anciens exclus. L’inclusion ne se fait pas « au détriment de ». Permettre à de nouvelles personnes d’exprimer leur identité n’enlève pas d’identité aux autres.
Troisièmement, votre approche doit permettre à chaque instant et à tout le monde de comprendre qu’être inclusif, c’est s’inscrire dans une réciprocité des regards. L’acceptation est une voie à double sens, chacun allant vers l’autre dans sa différence. Le respect est mutuel.
Enfin, il est également important de rappeler que, quelles que soient les identités propres, il existe un socle commun qui s’appelle l’entreprise (avec ses valeurs, ses objectifs, ses codes, ses engagements commerciaux…) et que l’inclusion doit la renforcer et non la desservir. Auquel cas, pratiquer l’inclusion n’aurait aucun sens.