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Débullons-nous !!!

Pendant près de 18 mois, nous avons vécu dans une bulle à laquelle seuls nos VVIP (very very important persons) pouvaient accéder. Parfois élargie à quelques proches, puis à nouveau réduite au foyer. On y a été plongé de force et on a dû s’adapter. Et l’adaptation est devenue la routine. 18 mois de travail autrement. 18 mois d’habitudes bousculées. 18 mois d’une vie dans un monde un peu parallèle.

Mais voilà qu’avec l’été, la Belgique et l’Europe sortent de leur retraite. Comme un coquillage qui s’ouvre et qui redécouvre le monde. Petit à petit. Retrouver les amis, les collègues, le monde du dehors. Et à nouveau, devoir se réhabituer et trouver ses marques. Les médias abordent avec humour cette question si peu cruciale, mais qui exprime pourtant notre méfiance à sortir de notre bulle : va-t-on se refaire la bise ?

Allez, aujourd’hui nous nous « débullons » et c’est toute la thématique de cette newsletter.

Article thématique

  • Repartons à la conquête de nos territoires

    Sortir de sa bulle. L’expression est sur toutes les lèvres. Pas facile pour tout le monde, car la Covid-19 a affecté nos rapports aux autres. Certains le font à reculons, d’autres sautent de joie à l’idée de retrouver une vie normale. La science démontre que l’humain est un animal social qui a besoin d’interactions. Mais, comment y arriver ? Est-ce vraiment obligatoire ? Qu’est-ce qui nous attend « dehors » ? Et surtout, comment ça va se passer à la maison, au travail et avec les amis dans ce monde post-Covid qui se dessine?

    Difficile aujourd’hui d’associer le mot « bulle » à autre chose (de savon, de BD…) qu’à cette triste limitation sociale qui nous a été imposée. Mais les nouvelles sont bonnes ! Il est enfin temps de faire exploser notre bulle avec une aiguille d’optimisme et de repartir à la conquête de nos anciens territoires : les bureaux, les places de cinéma, les canapés de nos amis et, évidemment, les chaises de la cafétéria et du restaurant d’entreprise.

    Facile et pas facile

    « Sortir de sa bulle sera différent d’une personne à l’autre, car l’espace que nous avons chacun créé et laissé à l’autre (compagnon, enfant, collègue) ou à notre travail est individuel, subjectif et personnel. Pour certains, le fait de devoir vivre davantage « reclus » a été accepté favorablement. Cela peut être le cas notamment chez les personnes plus introverties ou lorsque l’environnement extérieur était associé à des facteurs de stress », explique Ingrid Toussaint, psychologue clinicienne.

    La Covid-19 a pu amener dans certains cas une « bulle de respiration », en particulier lors du 1er confinement. Un ralentissement de la vie sociale, la disparition d’obligations sociales ou familiales, l’impératif de rester dans son canapé tous les soirs… Au début, ce n’était pas si mal. Pour d’autres par contre, ça a été plus compliqué dès le début, ou ça l’est devenu sur la longueur. Nous avons dû faire preuve de courage. Il est important de se rendre compte que lorsque la bulle a permis d’échapper à certaines angoisses ou peurs, celles-ci sont susceptibles de réapparaître et il sera nécessaire de s’y confronter un jour ou l’autre.

    Deux chèvres ou deux éléphants ?

    Le rapport qu’entretient l’Homme avec son espace est multiple. On distingue en effet quatre distances dans notre rapport à l’autre :

    • la distance publique : au-delà de 3m60
    • la distance sociale : de 1m20 à 3m60
    • la distance personnelle : de 40 à 120 cm
    • la distance intime : moins de 40 cm

    Ces espaces ont été chamboulés pendant la crise et nous ont obligés à repenser nos rapports à l’autre (collègue, enfants, amis…). Nous avons redéfini notre cercle intime et posé nos limites. Seules nos VVIP (very very important persons) y étaient autorisées. Aujourd’hui que nous nous débullons, quelle distance va-t-on adopter les uns avec les autres ? Deux chèvres, ou deux éléphants ? Dans quelques mois, aurons-nous repris nos habitudes et aboli les distances ? Tout ça aura-t-il finalement l’apparence d’un mauvais rêve qui nous laisse un goût amer en bouche ?

    « Il va devoir réapprendre à me partager »

    Vos relations familiales ont aussi été affectées par le confinement ? Vos rapports avec vos enfants ? Votre conjoint(e) ?

    Etre l’un sur l’autre, se voir 24h/24, télétravailler côte à côte, absorber le stress de l’autre, n’avoir aucun projet en perspective… C’est rude. Pour tout le monde, à tout âge. Nous avons tous pu lire avec tristesse dans la presse que l’enfermement avait renforcé les violences intra-familiales. Mais heureusement, il y a aussi eu de belles surprises et des re-rencontres.

    Témoignage de Veerle, 42 ans, fonctionnaire (Limbourg) : « Nous avons tous les deux travaillé depuis la maison pendant un an et demi. Le bilan est partagé. Cela nous a rapprochés un peu comme des amis. Et nous en avions besoin. Nous sommes plus soudés qu’avant. Mais nous nous sommes aussi parfois engueulés, car il a fallu gérer la logistique et le travail en se voyant 24/24h. On a créé une forme de cocon avec les enfants au milieu. D’un côté, je ressens un peu de tristesse et de mélancolie à l’idée de le quitter pour retourner au travail, comme lorsqu’on quitte un endroit de vacances où on était bien. Mais j’avoue avoir hâte de revoir des gens, faire des rencontres et avoir des choses nouvelles à raconter le soir à la maison en rentrant. Mon compagnon le vit autrement. Il aimait bien m’avoir auprès de lui. Mais on va devoir repenser le couple, les tâches ménagères, et surtout, il va devoir réapprendre à me partager. »

     

    Des êtres sociaux

    On a beaucoup parlé de la vie d’avant et de la vie d’après Covid. Même si le retour au travail a commencé, c’est véritablement à partir de septembre que la présence au bureau devrait être à nouveau la norme. Nous y consacrerons d’ailleurs notre news de la rentrée.

    Les cinémas, les restaurants et les lieux de loisirs ont, eux, totalement rouverts, à l’exception des loisirs nocturnes (discothèque…). La réouverture de tous ces espaces est une bonne nouvelle car, comme le disait déjà Aristote il y a plus de 2000 ans, « l'homme est un être sociable ; la nature l'a fait pour vivre avec ses semblables ». La bulle, le confinement, les mises à l’écart, les quarantaines et toutes ces joyeusetés que nous avons vécus sont totalement « contre-nature ».

    La philosophie nous explique d’ailleurs que le bonheur de l’homme ne peut passer que par la vie en société. Le retour à cette interaction est donc une bonne nouvelle. Et d’ailleurs, la science vient appuyer la philosophie. Robert Waldinger, psychologue et professeur à la Harvard Medical School, reconnu pour ses travaux sur les relations humaines, explique que « les personnes qui sont plus isolées qu'elles ne le souhaitent des autres constatent qu'elles sont moins heureuses, que leur santé se détériore plus tôt, que leur fonctionnement cérébral diminue plus tôt et qu'elles vivent moins longtemps que les personnes qui ne sont pas seules. » Certaines habitudes changeront mais sur l’essentiel, à savoir les interactions et la socialisation, nous retrouverons les canapés de nos amis où nous pourrons supporter les Diables rouges, nous referons de grosses fêtes avec des collègues ou des inconnus, car le lien à l’autre n’est pas qu’une envie, c’est un besoin.

    Des collègues « amis » redevenus collègues

    « Au début, c’était drôle de se voir par écrans interposés. Avec le temps, cela a vraiment affecté les rapports qu’on avait. Je me rends compte aujourd’hui que certains de mes collègues que je considérais presque comme des amis et des intimes, sont devenus des quasi-inconnus. On ne se parle plus que de boulot et on ne se voit plus que pour le boulot. Je ne le vis pas mal, je ne dis pas que c’est une mauvaise chose. Je dresse juste un constat après 18 mois d’isolement », raconte Thomas (35 ans), fonctionnaire dans un SPF à Bruxelles.

    Thomas, comme bien d’autres, a vu ses rapports aux autres bouleversés. Il y a eu le télétravail, bien sûr, mais il n’y a surtout plus eu les discussions de machine à café, les petites blagues en openspace, les verres en afterwork, les échanges informels dans le couloir, les regards complices lors de réunions. Thomas a, comme beaucoup, redéfini son espace, sa bulle et ceux qu’il y invite, et il constate également que les rares fois où il est allé au bureau « plus personne ne se faisait la bise. C’était vraiment bizarre, car on avait l’habitude de faire le tour des bureaux pour se saluer. Je ne suis pas sûr que cette habitude d’avant-covid va revenir ».

     

    Osons revenir

    Nous sommes un peu trop tôt dans le processus pour deviner ce que les sorties de bulles vont donner. Et ce que le retour au travail va donner. Toutefois, il est important d’oser ressortir de chez soi et de réapprendre à sociabiliser. Par petits pas s’il le faut. Pour beaucoup, le retour au bureau pourrait être vécu comme un soulagement, un retour à la normale, en particulier sur le plan des relations sociales.

    Ingrid Toussaint : « On retrouve des amis, un rythme et un sas entre la famille et le travail. Sortir de chez soi pour se rendre sur le lieu de travail peut contribuer à l’établissement de limites claires entre la vie privée et la vie professionnelle et ainsi aider à retrouver un cadre de vie plus structuré. Le fait de retrouver une vie sociale plus forte est essentiel pour le bien-être général et le bien-être particulier. On a tous des bulles, mais le fait d’avoir des gens autour de soi, c’est vital. Que ce soit à la maison ou en entreprise. Au niveau du stress professionnel par exemple, on considère que le support social est un facteur de protection. Ainsi, pouvoir partager, se voir, échanger de manière informelle autour de la machine à café, rire ensemble contribue à faire face à certaines situations professionnelles parfois plus compliquées », conclut-elle. On peut ainsi parler de facteur « tampon » pour diminuer le vécu subjectif du stress professionnel.

    Retrouver des collègues est donc une bonne chose, ce qui nous rappelle indirectement que… l’union fait la force 😊

Inspirations

  • Le rapport direct entre amis et bonheur

    Le bonheur est une conséquence directe de nos rapports à l’autre. De nombreuses études menées par des chercheurs sur des personnes plus âgées démontrent que les gens heureux sont ceux qui ont entretenu des relations sociales tout au long de leur vie.

    Avec une constante, ce n’est pas la quantité, mais bien la qualité de la relation qui importe. Les relations amicales (et familiales) qui se passent bien, nous maintiennent en bonne santé physique et mentale. La solitude, au contraire, est un facteur de dégradation pour l’être humain.

    Nous vous invitons à regarder ce qu’en dit Robert Waldinger dans une prise de parole TedEx (en anglais et anglais sous-titré).

  • Les relations sociales et les écrans

    « Rien n’est permanent, sauf le changement. » Cet aphorisme d’Héraclite d’Ephèse est d’une criante actualité au vu des changements de plus en plus importants et rapides de nos sociétés devenues digitales. Mais quel est l’impact réel du digital sur nos relations humaines ?

    Il y a bien sûr l’apparition d’une « génération Now » qui veut partager ou recevoir une information ou un contenu directement. Une génération définie également comme « génération without border ». Tout est accessible partout dans le monde sans limite d’espace. On joue au poker le soir avec un Canadien, un Chinois et un Sénégalais ; et le matin, on skype avec un Indien ou un de ses collègues de bureau qui est à l’étage du dessous. Des relations virtuelles de plus en plus importantes qu’il est nécessaire de compenser par des relations réelles.

    Plus d'infos ici

Le saviez-vous ?

  • +8

    C’est la confiance des consommateurs belges au mois de juin 2021. Il y a un an, elle était à -19 et même de -26 en août dernier.