Comment gérer les histoires au bureau?
Les histoires personnelles s’invitent souvent au bureau. Parfois, on les voit venir, parfois, elles s’imposent d’elles-mêmes. Amitié, amour ou désamour, comment apprendre à gérer ces histoires entre collègues ? Que faire en cas de conflit ? Comment apprendre à gérer des couples ou des exs ? Les relations interpersonnelles sont-elles productives pour la société ? Eclairage
Il est toujours très délicat d’aborder les relations personnelles sur le lieu de travail. La principale raison est qu'une « relation personnelle » ressort de la « sphère privée » et cette dernière est sacrée dans notre société. Cela s’impose comme une évidence, sauf en cas de fautes graves, harcèlement, comportements inappropriés, problème de gestion des émotions, …
Pour le dire de manière très claire : il n’existe aucune loi belge qui interdit des relations au travail, quelle que soit la nature des relations en question : amour, amitié, … D’après le tribunal du travail de Bruxelles : « Les relations intimes entre membres du personnel ne constituent pas un motif grave au sens de l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 lorsque les relations personnelles et professionnelles entre les intéressés n’ont jamais provoqué de critique et n’ont pas eu d’influence défavorable sur le bon fonctionnement de l’entreprise ».
Les nuances
Ne pas s’immiscer dans une relation ou vouloir l’interdire est une chose. Fermer les yeux en toutes circonstances, en est une autre. Il y a donc des nuances à apporter car l’employeur peut très légitimement « encadrer » les relations de ses collaborateurs. La première, c’est de constater que dans de nombreuses sociétés, il existe ainsi des « conseils » internes qui spécifient certains aspects des dites relations. On peut par exemple y lire que lorsqu’une relation interpersonnelle naît entre des collègues ayant des liens de subordination ou d’évaluation de travail pouvant résulter sur des promotions ou des augmentations salariales, il est recommandé de faire connaître cette relation. C’est d’ailleurs dans l’intérêt des collaborateurs afin qu’aucune suspicion de favoritisme ne puisse être mise en avant en cas de promotion, par exemple. La question qui se pose concernant les relations entre collègues est assez simple : comment rester neutre en toutes circonstances ?
Une seconde nuance peut également être apportée en fonction des performances des collaborateurs engagés dans des relations personnelles. Si une relation affecte les performances des personnes qui y sont engagées, l’employeur peut à un moment donné estimer que cette relation « nuit » au travail. Et en tirer certaines conclusions pouvant aller jusqu’à l’avertissement ou le licenciement.
Le personnel à l’extérieur
Dans un monde de plus en plus interconnecté par les réseaux sociaux où on like chaque jour les photos de vacances ou les photos des enfants de nos collègues, dans un monde où on connaît le plat mangé à midi ou l’état de santé du grand-père des autres collaborateurs, il peut être de plus en plus difficile de mettre la frontière relationnelle où elle doit être. Certains ont donc parfois beaucoup de mal à laisser à la porte de l’entreprise les anecdotes du week-end entre collègues/amis ou les engueulades du matin. Des comportements susceptibles d’affecter non seulement la relation de ces deux collaborateurs mais également de l’ensemble des équipes où ils travaillent. C’est ce que nous expliquait un de nos clients lors d’un précédent atelier d’OpenSpace: « Quand j’ai été promu directeur d’une équipe, j’étais très amis avec deux trois collègues de cette équipe. Nous avions convenu qu’au travail, et par respect pour tout le monde, nous n’aborderions jamais nos vies privées de manière publique. Un jour, je suis arrivé dans la cafétéria et un de mes amis était en train de montrer des photos de moi de la dernière sortie « amicale » que nous avions effectuée quelques jours plus tôt. Des photos où j’étais déguisé et légèrement alcoolisé. Il avait voulu se rendre intéressant mais ce genre de comportement sapait totalement mon autorité. Je ne lui ai jamais pardonné cet affront et non seulement, nous n’avons plus jamais fait la fête ensemble mais quand l’opportunité s’est présentée, je l’ai invité à intégrer une autre équipe ».
L’amitié au bureau est-elle productive ?
Les employeurs sont parfois pris dans un dilemme. D’un côté, ils doivent susciter le rapprochement interpersonnel de leurs collaborateurs, c’est la raison d’être des team-building qui vont renforcer l’esprit d’équipe nécessaire à la performance. Mais d’un autre côté, le rapprochement ne doit pas être trop important afin d’éviter d’avoir une bande de potes ou d’amoureux qui risquent de ne pas être concentrée sur les objectifs. Face à cette équation complexe, la question importante qui se pose est la suivante : l’amitié au bureau est-elle productive ? Si on en croit un des seuls sondages qui existe sur la question, un sondage d’Accountemps auprès d’employés canadiens réalisé en 2015, la réponse est oui. 61 % des participants considéraient en effet que leur productivité était meilleure quand ils comptaient des amis parmi leurs collègues. Selon les résultats d’un deuxième sondage d’Accountemps, avoir de bons amis au travail rend également les travailleurs plus heureux.
Et ailleurs dans le monde ?
Comment vit-on les relations amicales et amoureuses au travail en Europe, en Asie et en Amérique ? La société Randstad a réalisé en 2015 une grande enquête sur le sujet dans 30 pays. Les résultats sont intéressants. En moyenne, 60 % des collaborateurs privilégient leurs collègues à un bon salaire. Un taux qui monte à 88 % en Chine. Autre enseignement du sondage, une large majorité de collaborateurs se voient en dehors du travail et ils sont 71 % à développer de forts liens d'amitié avec leurs pairs. Les différences selon les pays sont importantes. 93 % des Brésiliens s'estiment proches et amis avec leurs collègues, alors que les Luxembourgeois ne sont que 20 % à avoir des amis au bureau. Les Français sont dans la moyenne : 58 % d'entre eux se voient en dehors du travail et 60 % ont des liens d'amitié forts avec leurs collègues. Les chiffres pour la Belgique ne sont pas connus. On retiendra encore que certains pays sont plus propices à l’amour au travail que d’autres. C’est le cas de la Chine, l'Inde et la Malaisie où 70 % des personnes disent avoir déjà été amoureux au travail.